Technique & Histoire
INTRODUCTION
En 1951, les éditions BIAS publient, dans la collection Mes chefs d’œuvre, quatre Albums en relief à colorier et à découper. Création DECBEL.
Quatre variations autour des thèmes des fleurs et des bateaux : colorier les dessins proposés, les découper et les mettre en volume. La collection a existé quelques années à partir de 1951 et a laissé quelques traces dans les catalogues des éditions BIAS.
Puis Decbel se tourne vers un medium plus riche de possibilités : le verre et la peinture sous verre ou fixé sous verre.
PEINTRE SOUS VERRE EN RELIEF
Faire du relief avec du plat, l’idée n’est pas nouvelle ! La perspective, les dioramas, la stéréoscopie, les trompe-l’oeil, les livres pop-up, le théâtre de papier, le ciné 3D.
Et le verre multicouche !
Le fixé sous verre est un art traditionnel. On peint à l’envers sous le verre pour l’utiliser comme support et protection de la peinture.
C’est un monde de transparence, un monde à l ‘envers. Un monde fragile et magique. Un monde brillant, caché, protégé par le verre. Un monde d’ailleurs, étranger et étrange, fixé sous verre comme on dirait sous cloche.
Protégé mais prisonnier.
A la magie de la peinture sous verre, Decbel ajoute le relief par la superposition de plusieurs plaques.
Quatre couches de verre et hop ! voilà le bateau prêt à voguer, l’oiseau prêt à s’envoler. Comme si, de cette prison de verre, il fallait pouvoir s’échapper.
LES ŒUVRES DE DECBEL

Fleurs, calèches, bateaux, oiseaux sont déclinés en tableaux et objets utilitaires – plateaux, sous verres, bar, porte-couteaux, broches.
Mon premier contact avec ses œuvres, ce fut le Chardonneret trouvé sur une table de brocante. La jeune femme qui le vendait savait seulement que ce petit tableau avait appartenu à son père. Pour ma part, j’ai longtemps cru que j’avais acheté et que j’avais sous les yeux un oiseau de verre compact enfermé dans un cadre, œuvre isolée.
La signature m’a mis sur la piste d’une quête inattendue.
Toutes les œuvres sont signées. La signature, souvent hésitante et maladroite car écrite à l’envers, sous le verre elle aussi, est une affirmation d’identité artistique, l’identification d’une marque.
Fleurs, oiseaux ont un titre qui les identifie précisément. C’est presque un travail d’ornithologue et la poésie de Decbel est aussi dans les noms d’oiseaux.
LES QUESTIONS
Colibri du désert, malure, chardonneret, grand minivet, oiseau des marais, veuve de paradis, …
Pourquoi ces oiseaux ? Pour leur nom, leur forme, leur couleur ? L’influence de planches d’Audubon, des géoglyphes de Nazca ?
A cette époque Olivier Messiaen compose Réveil des oiseaux et Catalogue d’oiseaux.
Decbel travaille à Paris et ses œuvres vont partout. Les étiquettes au dos de certaines œuvres nous emmènent à Marseille, Alger, Casablanca, Rouen, …. Comment ces galeries algériennes, marocaines, bretonnes, normandes, marseillaises ont-elles eu accès à ces tableaux ? Ces oiseaux, ces bateaux ne sont pas allés au bout du monde d’un coup de voile ou d’aile. Y avait-il une galerie, un réseau de distribution ? Celui des éditions BIAS ou un autre ? Sur quelle durée s’est étalée sa production ?
Nous ne le savons pas.
Néanmoins, alimenter un tel réseau, quel qu’il soit, nécessite une production assez importante. Des peintres sous verre en région parisienne au 18ème siècle ou à Lyon dans ces années 1950 ont travaillé en atelier.
Cet univers, cette imagination, donnent envie de leur redonner de l’épaisseur. C’est l’idée de ce regroupement d’objets jusqu’ici dispersés : leur rendre cohérence, retisser leur beau destin et comprendre les conditions de leur production dans la France de l’après-guerre.
Faire entendre le chant de ces oiseaux qui jamais ne se sont tus.
