À l’origine, un portrait de Charles Baudelaire.
Son ami Gustave Courbet l’a peint en 1847.

Baudelaire, n’est pas encore célèbre : Les fleurs du Mal paraitront 10 ans plus tard.

 

 

 

 

 

 

 

Gustave Courbet. Portrait de Charles Baudelaire. X Ray.
Xavier Lucchesi. 2000

Mais ce que nous regardons là, c’est une œuvre de Xavier Lucchesi datée de 2000. Lucchesi utilise les rayons X pour aller chercher l’invisible, le caché, ce qu’on ne voit jamais dans les œuvres d’art.
Et ce qu’il nous montre, c’est ceci : sous Baudelaire il y a un corps, une esquisse de corps : un bras tendu, l’autre replié. Le scan du tableau nous révèle ça : Courbet a peint Baudelaire sur une toile qu’il avait destinée à une autre œuvre.
Courbet a-t-il pensé à ce corps quand il a peint son ami ? Pouvait-il imaginer, a-t-il eu l’intuition1 que, un jour, quelqu’un verrait ce corps couché sous Baudelaire ?
Le travail de révélation, de mise en couleur de Xavier Lucchesi souligne la complémentarité des deux couches. Le bras tendu embrasse Baudelaire. La jambe devient livre. Les deux corps sont emmêlés, se perdent l’un dans l’autre.

C’est ce qui m’intéresse ici.
Comme une plaque de verre peinte par Decbel donne sens à sa voisine, est-ce-que le corps repenti donne sens au Baudelaire de Courbet ? Est-ce-que ce corps donne relief à Baudelaire ou Baudelaire au corps ?
Mais chez Decbel, tout est visible. C’est le principe de son travail : que, par la transparence du verre, chaque couche complète consciemment la précédente pour, à la fin, donner l’impression de volume. Lucchesi, lui, dévoile ce que nous pensons que Courbet aurait voulu cacher.

L’oeuvre de Xavier Lucchesi réévalue le temps qui passe, le valorise, lui donne relief.
Le travail de Decbel est un relief dans l’espace, le travail de Lucchesi est un relief dans le temps.

1 Wilhelm Röntgen découvrira les rayons X en 1896.


Zoom sur