Chapelle des Âmes-du-Purgatoire. Sainte Marguerite. 36 rue Saint Bernard 75011 Paris.
C’est donc ici que l’histoire a commencé : au pied de l’église Sainte Marguerite. C’est ici que le chardonneret avait atterri et m’attendait sur une table de vide-grenier.
Sainte Marguerite c’est l’église du faubourg Saint Antoine, témoin de l’histoire, parfois tragique, de Paris.
Aristide Bruant raconte que Quand elle était p’tite / Le soir elle allait / À Sainte-Marguerite / Où qu’elle se dessalait // À la Bastille / On aime bien / Nini Peau d’chien / Elle est si bonne et si gentille
C’est ici qu’il y a la tombe de l’enfant mort au Donjon du Temple, Louis XVII. Enfin, on le disait jusqu’à ce que des recherches plus modernes disent que, finalement, non.
Un vitrail commémore les Carmélites guillotinées place du Trône le 17 juillet 1794, celles de Dialogue des Carmélites de Georges Bernanos et Francis Poulenc. Un autre rappelle les insurrections de Juin 1848.
C’est ici qu’ont été blessées et assassinées 21 victimes le 13 novembre 2015.
Et puis il y a ce pourquoi j’en parle ici : au fond à gauche, nichée derrière une branche du transept : la Chapelle des Âmes-du-Purgatoire. Elle est née en 1756 de la rencontre entre le curé de Sainte-Marguerite et un jeune architecte, Victor Louis, futur architecte du grand théâtre de Bordeaux. Le curé souhaite agrandir son église, trop petite pour accueillir la population du faubourg, et commande à l’architecte une chapelle funéraire.
Victor Louis choisit un éclairage zénithal et, par un trompe-l’œil génial, transforme le petit espace (15m x 10m) en basilique ! C’est Paolo Antonio Brunetti, décorateur italien qui le réalise. Colonnes et statues sont peintes sur les murs, la voûte en plein cintre est décorée de caissons. Gabriel Briard peint le tableau d’autel qui représente l’envolée des âmes du Purgatoire. La lumière zénithale qui baigne le tableau accentue l’impression de profondeur
Tout est peinture, rien n’est relief. Mais tout est relief, jusqu’aux âmes du purgatoire, bien en chair, qui s’envolent vers des cieux rédempteurs et, souhaitons-leur, une éternité douce. Diderot n’y croyait pas trop qui ne trouvait pas à Briard la puissance de Rubens !
Que Decbel, Brunetti et Briard s’y soient rencontrés me parait du plus joyeux présage. Tous faiseurs de relief avec du plat.
Le chant manque aux oiseaux de Decbel. Les soirs de début et de fin d’été, les cris des enfants juste sortis de l’école Saint-Bernard transforment le square voisin en un chœur de joie ou de pleurs. Quelques heures après, vers 19h, Sainte Marguerite chante. L’Angelus rythme le temps, donne de l’espace, crée l’espace.
Angelus, trompe l’œil, peinture à l’envers, oiseaux dans leur cage de verre, chœur d’enfants. Tout est là, prêt à l’envol.